Israël en guerre : quand la vraie gauche dit non

Pour les révolutionnaires marxistes, la ligne de démarcation principale ne passe pas entre les nations, mais entre les classes sociales. Dans cette optique, il est essentiel d’exprimer une solidarité claire avec toutes les forces politiques et sociales en Israël dont la résistance au sionisme – dont le courant dominant est en voie de métamorphose en une nouvelle forme de fascisme – s’ancre dans un positionnement de classe.
Alors que le gouvernement d’extrême droite dirigé par Benjamin Netanyahou mène, depuis l’attaque armée du Hamas du 7 octobre 2023, une offensive génocidaire contre la population de Gaza, il vient également de déclencher une guerre contre l’Iran, avec la complicité active de son mentor impérialiste, les États-Unis — en violation flagrante du droit international. À la suite de ces événements récents, la fracture nette au sein des forces qui se revendiquent « progressistes » se confirme dans le pays.
Silence complice de la « gauche » sioniste, voix dissidente de la gauche radicale
Tandis que la « gauche » sioniste demeure largement silencieuse ou alignée sur le discours sécuritaire dominant, une autre voix – minoritaire mais résolue – s’élève : celle de la gauche radicale, représentée notamment par le Parti communiste d’Israël (Maki) et le front uni Hadash. Ce dernier, acronyme en hébreu de Front démocratique pour la paix et l’égalité, regroupe des militant·e·s juif·ve·s et palestinien·ne·s d’Israël. Hadash défend une ligne anticolonialiste, sociale et antiraciste, et siège à la Knesset, où il a participé à plusieurs alliances électorales avec des partis arabes dans le cadre de la Liste commune.
Parmi les figures emblématiques de cette opposition parlementaire figurent le député communiste Ofer Cassif – l’une des rares voix juives à dénoncer sans ambiguïté les crimes de guerre à Gaza – et Ayman Odeh, dirigeant historique de Hadash, partisan d’un vivre-ensemble fondé sur l’égalité des droits. Depuis le 7 octobre 2023, ces élu·e·s, comme l’ensemble des militant·e·s de gauche radicale, sont confronté·e·s à une répression croissante : tentatives d’exclusion parlementaire, arrestations arbitraires, campagnes de haine dans les médias et harcèlement judiciaire. La criminalisation de toute critique du gouvernement ou de toute solidarité avec les Palestinien·ne·s s’intensifie, rendant leur combat d’autant plus héroïque et nécessaire.
Motion Hadash-Ta’al rejetée : un consensus militariste écrasant
Cette volonté d’étouffer toute voix dissidente s’est illustrée de manière éclatante le 16 juin 2025 à la Knesset. Ce jour-là, la motion de censure déposée par la coalition Hadash-Ta’al a été rejetée, non seulement par la majorité d’extrême droite, mais aussi avec le soutien de divers partis d’opposition au gouvernement Netanyahou. La motion dénonçait une politique de « guerre éternelle et d’annexion sans horizon politique », mais ses auteur·e·s se sont heurté·e·s au mur du consensus militariste, justifié par « la guerre en cours contre l’Iran »1.
Un discours d’Ayman Odeh digne de Karl Liebknecht
Le député Ayman Odeh, auteur de la motion, a prononcé un discours d’une rare clarté morale – à l’instar de Karl Liebknecht lors de son célèbre discours anti-guerre au Reichstag en 1914 contre les crédits militaires :
« Nous demandons ce qui devrait aller de soi : la vie, la justice, la liberté et la sécurité. Nous demandons un avenir différent – pour nous toutes et tous. Il n’y a qu’un seul moyen d’y parvenir : se dresser courageusement contre les fauteurs de guerre. »
Il a accusé l’opposition de capituler honteusement, en soutenant sans réserve le gouvernement Netanyahou au nom d’une soi-disant unité nationale :
« Alors, quand viendra exactement le temps de la paix ? Après la destruction d’une autre ville, d’un autre village, d’un autre quartier, d’un autre immeuble, d’une autre maison, d’une autre vie ? »
La réponse de la droite a été d’une extrême violence. Le député Ofir Katz (Likoud) a accusé Odeh d’être « un ennemi de l’État d’Israël » et de vouloir « voir l’Iran doté de l’arme nucléaire ». Quant au président de la Knesset, Amir Ohana, il s’est félicité de « l’unanimité retrouvée ». Le même jour, le ministre de la Défense Israel Katz a menacé directement les civils de Téhéran : « Les habitants de Téhéran vont en payer le prix, et bientôt. »
Communistes d’Iran et d’Israël : une prise de position commune exemplaire
Dans ce contexte, une déclaration commune d’une grande clarté a été publiée le 17 juin 2025 par les partis communistes d’Iran et d’Israël. Le Parti Tudeh d’Iran et le Parti communiste d’Israël y condamnent fermement l’agression militaire lancée par le gouvernement Netanyahou contre l’Iran, ainsi que le soutien actif des États-Unis2.
Ils soulignent que les crimes commis par le gouvernement israélien à Gaza et en Cisjordanie – avec l’appui de ses allié·e·s aux États-Unis, en Grande-Bretagne et dans l’Union européenne – ont déjà entraîné la mort de plus de 55 000 Palestinien·ne·s, dont plus de 18 000 enfants. Selon eux, cette complicité a donné au gouvernement israélien un feu vert pour étendre son agression à d’autres pays de la région, dans le but de redessiner la carte du Moyen-Orient au service des intérêts stratégiques de Washington.
Les deux partis dénoncent également l’instrumentalisation cynique de la guerre contre l’Iran pour intensifier la souffrance inhumaine infligée au peuple palestinien dans la bande de Gaza et en Cisjordanie occupée. Ils appellent la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour éviter une nouvelle catastrophe régionale.
Opposés à toute forme d’armement nucléaire, les deux partis réaffirment leur soutien à une démilitarisation complète du Moyen-Orient, par l’abandon des armes nucléaires et la signature, par tous les pays de la région – y compris Israël – d’un traité de non-prolifération des armes nucléaires. Enfin, ils en appellent à l’unité de toutes les forces progressistes et éprises de paix, en Israël, en Iran et dans le monde, pour faire obstacle à cette fuite en avant belliciste et imposer une paix durable fondée sur le droit international.
Conclusion
Il s’avère qu’en Israël, comme partout ailleurs, la vraie gauche se distingue par un positionnement clairement opposé à toutes les guerres impérialistes. Apportons notre solidarité militante à toutes les forces anti-guerre israéliennes. Une telle solidarité devrait inclure un combat conséquent en Europe – et notamment au Luxembourg – contre les logiques de guerre et de militarisation promues par nos classes dirigeantes.
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Débat à la Knesset sur la motion de censure déposée par Hadash-Ta’al (16 juin 2025) — 🔗 Lien vers maki.org.il⮐
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Déclaration conjointe des partis communistes d’Iran et d’Israël (17 juin 2025) — 🔗 Lien vers maki.org.il⮐